Vers le Dimanche 20 novembre 2022
Vers la Solennité du Christ Roi de l'Univers – Année C

Pour terminer l’année liturgique et nous aider à entrer dans le mystère de la Royauté de Jésus que nous célébrons dimanche, l’Eglise nous replonge dans l’ambiance de la Passion. La scène est racontée presque comme une liturgie. Il y a en effet des choses à voir, à entendre et à comprendre avec le coeur. Le lieu et le temps ne sont d’ailleurs pas anodins : nous sommes un peu en dehors de la ville et à la veille du grand jour de Pâques. Par l’imagination, je me replace en cet instant unique et tragique de l’histoire humaine. Qu’est-ce que cela évoque en moi ? Qu’ai-je envie de dire à Jésus sur la croix ?

La foule a une attitude de voyeurisme, de curiosité malsaine. Face à la souffrance des condamnés, elle manque totalement de compassion. On perçoit beaucoup de bruit et d’agressivité. Cette scène rappelle les tentations du Christ au désert : « si tu es le fils de Dieu, alors fais un acte magique et tous sauront qui tu es… ». Comme au désert, Jésus est affaibli, vulnérable et des voix extérieures l’invitent à une action d’éclat. Mais cette fois-ci, Jésus ne répond pas en citant les Ecritures. Il garde le silence. Je le contemple et j’essaie de comprendre intérieurement ce qui se passe là pour notre salut, pour mon salut.

Les témoins de ce triste spectacle sont divers : il y a « le peuple qui restait là à observer », les chefs du peuple et aussi les soldats romains acteurs de cette mise à mort. Et bien qu’ils soient ennemis, Juifs et païens sont pour une fois d’accord pour tourner en dérision la souffrance de Jésus. Les moqueries sont particulièrement cruelles car elles touchent le cœur de la vocation de Jésus : « qu’il se sauve lui-même », « sauve-toi-même ». C’est bien de cela dont il s’agit : Jésus le Sauveur renonce à tout et même à se sauver lui-même ! Je prends le temps de relire les paroles des uns et des autres et je rends grâce au Seigneur qui reste le sauveur de tous, malgré nos indifférences et nos moqueries

Saint Luc nous fait entrer dans l’intimité d’un dialogue assez incroyable entre les condamnés autour de Jésus. L’un est en colère et injurie même Jésus. L’autre prend sa défense ! Ne jugeons pas trop vite le premier larron car parfois nous sommes nous-mêmes dans une certaine « agressivité/incompréhension » face à ce que Dieu ne semble pas faire pour le monde. Et les paroles du mauvais larron font penser à certains psaumes de désespérance et justement aux paroles du Ps 21 que saint Marc met dans la bouche de Jésus : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mc 15, 34). Je répète ces paroles et je laisse résonner aussi en moi les mots de Jésus : aujourd’hui, avec moi, Paradis.

Quelle belle profession de foi que celle du « bon larron » : « Jésus, souviens-toi de moi ». Cet homme agit en croyant. Il est plein de courage et de vérité : alors qu’il est en train de mourir, il sait reconnaître ses péchés et il sait nommer Jésus. Chacun de nous est selon les jours et les évènements le bon et le mauvais larron. Je choisis en ce jour d’être un homme ou une femme de foi. Telle peut être ma demande de grâce : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu seras dans ton Royaume ».

Chez saint Luc, on s’en rappelle, le mot « aujourd’hui » est employé dans des moments-clef : à Noël avec les bergers, au baptême, à la synagogue de Nazareth, dans la prière du Notre Père, lors de la guérison d’un grabataire, deux fois dans l’épisode de Zachée et enfin dans notre scène. Qu’est-ce que cela signifie dans ma vie que c’est aujourd’hui que Dieu me sauve et m’ouvre à sa vie ? Seigneur, sauve-moi !

Parfois on se dit que cette fête du Chris-Roi de l’Univers est un peu ringarde et dépassée. Qu’est-ce qu’elle apporte de plus ? Quel visage de Jésus nous aide-t-elle à mieux contempler ? Pourquoi clôt-elle l’année liturgique ? Fête instituée par le Pape Pie XI en 1925, la fête du Christ Roi de l’Univers est de tonalité multiple : nous célébrons un Dieu qui règne, qui a de l’autorité sur tous et sur tout. Mais sa manière de régner est de nous aimer jusqu’à la croix ! Selon les années, nous contemplons le dialogue entre Pilate et Jésus sur sa royauté, le jugement dernier ou Jésus sur la croix qui parle de son Royaume. A chaque fois, le paradoxe de la puissance et de la non-puissance de Dieu est présent. C’est en fait un mystère à découvrir ensemble : son Royaume est un Royaume d’amour et compassion. Reconnaissons qui est le Christ et rendons lui grâce car il va jusqu’au bout pour nous sauver.