Un drôle d’anniversaire (Patrick Wey, jésuite)

Le 19 février 2007 j'étais à Paris, à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière afin d'avoir un diagnostic sur la maladie neurologique qui avait manifesté ses premiers signes depuis quelques mois. La réponse a été donnée assez facilement, tellement les symptômes étaient clairs : Sclérose Latérale Amyotrophique ou maladie de Charcot, plus familièrement SLA. En plus du nom, je repartais pour Nancy en ayant appris que la maladie était évolutive, incurable et que l'on ne pouvait pas en dire beaucoup plus. J'avais en poche une ordonnance pour le seul médicament ayant une action reconnue mais limitée, le Rilutek, la recommandation de faire régulièrement des séances d'orthophonie et de kinésithérapie et un rendez-vous à prendre au centre SLA de Nancy Homme de mon temps, je suis parti en chasse d'un complément d'information sur internet. J'ai ainsi découvert quelques sites présentant la maladie, des conseils pratiques et des statistiques peu réjouissantes : espérance de vie entre 3 et 5 ans, sachant que la moitié des malades décèdent durant les trois années suivant le diagnostic ! Tout d'un coup mon horizon s'est fermé et pendant deux mois j'ai tourné en rond, voulant tout faire et n'ayant envie de ne rien faire. Heureusement les activités dans lesquelles j'étais engagé me sollicitaient. Ainsi, lors d'une formation à l'accompagnement spirituel, je participais à une Eucharistie avec un petit groupe dans une communauté près de Strasbourg. C'était le deuxième dimanche de Pâques et l'homélie du prêtre m'a particulièrement touchée, et à la fin de la messe, à la sacristie, je me suis mis à pleurer dans ses bras. J'avais compris intérieurement que le Christ m'appelait à vivre, et à vivre avec cette maladie. Un chemin était possible et je n'étais plus seul. Au fil des mois je me laissais gagner par cette attitude consistant, non pas à lutter contre la maladie, combat épuisant et perdu d'avance, mais à vivre avec la maladie ; non pas comptabiliser ce que je ne pouvais plus faire, mais goûter autant que possible ce que je faisais. Je crois que depuis ce moment, la paix ne m'a plus quittée. Depuis j'ai perdu une bonne partie de mon autonomie pour la marche, je ne peux plus conduire de voiture, ni sortir seul dans la rue même aidé par ma canne. Alors une amie m'a prêté un fauteuil roulant et mes compagnons jésuites m'emmènent à l'église, ou en promenade lors des sorties communautaires. Les membres des deux équipes CVX que j'accompagne s'organisent pour me chercher lors des réunions ou pour un temps de loisir. J'ai plus de difficultés à parler et cela me demande un certain effort physique, c'est pourquoi j'ai dû abandonner une partie de mes activités. Et voilà qu'un compagnon de Paris me propose de travailler avec l'équipe de Notre Dame du Web, un centre spirituel ignatien sur internet. Depuis deux ans, grâce à l'informatique, je participe à l'élaboration de retraites, et cette activité me stimule et me nourrit spirituellement. Lorsque j'ai du temps disponible je goûte à nouveau l'écoute de la musique, et je constate que cette passion ancienne est toujours intacte en moi. Je reste aussi curieux du monde dans lequel nous sommes, alors je traque les documentaires sur Arte ou je me promène sur la Toile au gré de mes interrogations. J'ai encore quelques difficultés à trouver le bon créneau pour la lecture, mais cela viendra. Il me reste un dernier mot pour l'équipe médicale que je rencontre régulièrement. Deux fois par semaine l'orthophoniste et le kinésithérapeute viennent à mon domicile pour entretenir ce qui fonctionne encore, et si cela se présente soulager un muscle trop raide ou donner un conseil. Tout les  trimestres, je passe une journée en neurologie pour un bilan complet, notamment respiratoire. Ainsi viennent me voir l'infirmière pour la prise de sang et le moral, l'interne pour l'état général, la diététicienne pour l'alimentation, l'ergothérapeute pour la vie quotidienne, la kiné pour le « testing » des bras et des jambes, un petit tour en pneumologie pour mesurer la capacité respiratoire et l'oxygène dans le sang et en dernier la neurologue pour le bilan final. Comme le climat dans le service est très bon, les personnes vraiment attentionnées, j'ai du plaisir à y aller. En terminant ce mot, je regarde l'orchidée offerte pour mes cinquante ans. Depuis quelques jours, en plein hiver, elle produit, des boutons floraux, promesse de belles fleurs. Cela m'émerveille, c'est bon signe. En toute amitié Patrick

Contenu de la prière

Le 19 février 2007 j'étais à Paris, à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière afin d'avoir un diagnostic sur la maladie neurologique qui avait manifesté ses premiers signes depuis quelques mois. La réponse a été donnée assez facilement, tellement les symptômes étaient clairs : Sclérose Latérale Amyotrophique ou maladie de Charcot, plus familièrement SLA. En plus du nom, je repartais pour Nancy en ayant appris que la maladie était évolutive, incurable et que l'on ne pouvait pas en dire beaucoup plus. J'avais en poche une ordonnance pour le seul médicament ayant une action reconnue mais limitée, le Rilutek, la recommandation de faire régulièrement des séances d'orthophonie et de kinésithérapie et un rendez-vous à prendre au centre SLA de Nancy

Homme de mon temps, je suis parti en chasse d'un complément d'information sur internet. J'ai ainsi découvert quelques sites présentant la maladie, des conseils pratiques et des statistiques peu réjouissantes : espérance de vie entre 3 et 5 ans, sachant que la moitié des malades décèdent durant les trois années suivant le diagnostic ! Tout d'un coup mon horizon s'est fermé et pendant deux mois j'ai tourné en rond, voulant tout faire et n'ayant envie de ne rien faire. Heureusement les activités dans lesquelles j'étais engagé me sollicitaient. Ainsi, lors d'une formation à l'accompagnement spirituel, je participais à une Eucharistie avec un petit groupe dans une communauté près de Strasbourg. C'était le deuxième dimanche de Pâques et l'homélie du prêtre m'a particulièrement touchée, et à la fin de la messe, à la sacristie, je me suis mis à pleurer dans ses bras. J'avais compris intérieurement que le Christ m'appelait à vivre, et à vivre avec cette maladie. Un chemin était possible et je n'étais plus seul.

Au fil des mois je me laissais gagner par cette attitude consistant, non pas à lutter contre la maladie, combat épuisant et perdu d'avance, mais à vivre avec la maladie ; non pas comptabiliser ce que je ne pouvais plus faire, mais goûter autant que possible ce que je faisais. Je crois que depuis ce moment, la paix ne m'a plus quittée.

Depuis j'ai perdu une bonne partie de mon autonomie pour la marche, je ne peux plus conduire de voiture, ni sortir seul dans la rue même aidé par ma canne. Alors une amie m'a prêté un fauteuil roulant et mes compagnons jésuites m'emmènent à l'église, ou en promenade lors des sorties communautaires. Les membres des deux équipes CVX que j'accompagne s'organisent pour me chercher lors des réunions ou pour un temps de loisir.

J'ai plus de difficultés à parler et cela me demande un certain effort physique, c'est pourquoi j'ai dû abandonner une partie de mes activités. Et voilà qu'un compagnon de Paris me propose de travailler avec l'équipe de Notre Dame du Web, un centre spirituel ignatien sur internet. Depuis deux ans, grâce à l'informatique, je participe à l'élaboration de retraites, et cette activité me stimule et me nourrit spirituellement.

Lorsque j'ai du temps disponible je goûte à nouveau l'écoute de la musique, et je constate que cette passion ancienne est toujours intacte en moi. Je reste aussi curieux du monde dans lequel nous sommes, alors je traque les documentaires sur Arte ou je me promène sur la Toile au gré de mes interrogations. J'ai encore quelques difficultés à trouver le bon créneau pour la lecture, mais cela viendra.

Il me reste un dernier mot pour l'équipe médicale que je rencontre régulièrement. Deux fois par semaine l'orthophoniste et le kinésithérapeute viennent à mon domicile pour entretenir ce qui fonctionne encore, et si cela se présente soulager un muscle trop raide ou donner un conseil. Tout les trimestres, je passe une journée en neurologie pour un bilan complet, notamment respiratoire. Ainsi viennent me voir l'infirmière pour la prise de sang et le moral, l'interne pour l'état général, la diététicienne pour l'alimentation, l'ergothérapeute pour la vie quotidienne, la kiné pour le « testing » des bras et des jambes, un petit tour en pneumologie pour mesurer la capacité respiratoire et l'oxygène dans le sang et en dernier la neurologue pour le bilan final. Comme le climat dans le service est très bon, les personnes vraiment attentionnées, j'ai du plaisir à y aller.

En terminant ce mot, je regarde l'orchidée offerte pour mes cinquante ans. Depuis quelques jours, en plein hiver, elle produit, des boutons floraux, promesse de belles fleurs. Cela m'émerveille, c'est bon signe.

En toute amitié

Patrick


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